A l’occasion des Journées de l’entrepreneur qui se déroulent cette semaine, un sondage réalisé en ligne par OpinionWay auprès d’un échantillon de 998 personnes affirme que 63% des sondés déclarent ne pas être ou ne pas avoir été tentés par l’aventure de la création d’entreprise. 77% d’entre eux pensent que l’environnement ne leur est pas favorable. Pour 68 % des porteurs de projet, la création d’entreprise est avant tout un moyen de créer son propre emploi. Ces chiffres expriment de toute évidence une forte réticence à entreprendre dans notre pays.

Au même moment qu’il détaillait le nouveau statut de l’auto entrepreneur, Hervé Novelli déclarait s’attendre à des créations d’entreprises « record » en 2008, malgré le ralentissement économique. Au premier regard, ces chiffres paraissent antinomiques. En les analysant de plus près, on peut se risquer à l’interprétation suivante : la plupart des entreprises créées ne sont pas nées d’une envie entrepreneuriale, mais d’une démarche par défaut, menée dans le seul but de retrouver un emploi. Autrement dit, la plupart des entreprises sont créés par nécessité, et non par opportunité, leur fondateur se « rabattant » sur l’entrepreneuriat parce que le salariat n’a pas voulu d’eux.

Ce constat n’a rien d’étonnant. En cette période de crise, l’aversion au risque augmente. Le système financier est cloué au pilori. On entend parler de l’entreprise uniquement dans le contexte d’un plan de licenciement ou d’un scandale financier. Ca ne donne pas envie … Il est caractéristique de constater qu’à aucun moment dans le sondage cité ci-dessus, on ne parle de l’entrepreneuriat comme moyen d’expression et d’émancipation. Or la vraie richesse de la démarche entrepreneuriale consiste justement à « prendre sa vie en main », c’est-à-dire à rendre les individus qui entreprennent plus libres et plus épanouis. On n’entreprend pas « faute de mieux », mais avec l’envie chevillée au corps. C’est justement parce que nous sommes en période de crise qu’il est urgent d’inverser la tendance, et de passer de l’entrepreneur « nécessiteux » à l’entrepreneur « opportuniste ».

Philippe Hayat