Par Philippe hayat, Président de 100.000 entrepreneurs

L’enseignement de l’économie au lycée provoque de vifs débats ces derniers temps : annonces gouvernementales, déclarations multiples de nombreuses personnalités, commissions ad hoc, manifestations d’enseignants. Les questions en discussion pourraient se résumer ainsi :
Faut-il enseigner l’économie au lycée ? Ce débat semble tranché, puisque toutes les parties prenantes (le gouvernement, les enseignants, les élèves et leurs parents) s’accordent à trouver cet enseignement nécessaire, surtout face à la crise actuelle que les jeunes doivent apprendre à déchiffrer. Cet enseignement sera vraisemblablement pris en compte dans la réforme en cours de la classe de seconde.

Les manuels scolaires d’économie fournissent-ils aux élèves une vision objective de l’économie ? Là encore, le débat semble tranché par le récent rapport Guesnerie, qu’on ne peut soupçonner de partialité. Celui-ci reconnaît à certains manuels scolaires une insuffisance à décrire le monde économique tel qu’il est. Ils traitent le sujet de façon partielle (en oubliant, par exemple, d’expliquer les mécanismes de marché) et souvent négative (en évoquant exclusivement  les conséquences néfastes des processus économiques sur la société).

Quelle économie faut-il enseigner ? Cette question reste en suspend, parce qu’elle est sans doute la plus idéologique de toutes. Jusqu’à présent, les sciences économiques et les sciences sociales sont mêlées au sein d’un même programme. L’analyse des mécanismes économiques par le seul prisme social présente des risques de dérapage idéologique. Sans doute faudrait-il isoler, dans le nouveau programme de seconde,  un module spécifique de « sciences de l’économie » (et pas seulement « sciences de la société » tel qu’il est prévu), expliquant les mécanismes économiques fondamentaux et permettant aux élèves de mieux comprendre le monde dans lequel ils vivent.

Ces questions, qui monopolisent actuellement les débats, occultent pourtant un sujet majeur : la sensibilisation des jeunes au monde professionnel, c'est-à-dire aux métiers, aux secteurs d’activité, aux mécanismes de l’entreprise, qu’elle soit à but lucratif ou social. Aujourd’hui en France, il faut être en situation de difficulté scolaire pour en entendre parler. Ces notions échappent totalement au « fort en thème », qui suit la filière d’enseignement général, et qui arrive à l’âge de 20 ans sans jamais avoir réfléchi à ses envies professionnelles. A force de séparer le monde de la connaissance du monde du savoir-faire, on prive les élèves d’outils pour comprendre la vie réelle et s’y projeter.

Tant qu’à appréhender le monde professionnel dès le collège, autant le faire sous l’angle de l’envie. « Quel projet professionnel ai-je envie de porter plus tard ? », voilà la question qui devrait être abordée dès la Troisième, puis chaque année suivante, quelle que soit la filière d’enseignement. Pour cela, il faut multiplier les témoignages professionnels à l’intérieur des classes et les expériences professionnelles à l’extérieur. Les enseignants y sont de plus en plus sensibles, notamment dans les options de découvertes professionnelles mises en place en troisième, mais encore peu fréquentées. Il n’est jamais trop tôt pour transmettre aux jeunes l’envie de prendre leur avenir en main.